Aux termes de l’article L. 17 du livre des procédures fiscales, en ce qui concerne les droits d'enregistrement et la taxe de publicité foncière ou la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elle est due au lieu et place de ces droits ou taxe, l'administration des impôts peut rectifier le prix ou l'évaluation d'un bien ayant servi de base à la perception d'une imposition lorsque ce prix ou cette évaluation paraît inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes ou déclarations.
Lorsqu'elle fait application des dispositions de l'article L. 17 précité, l'administration est tenue d'apporter la preuve de l'insuffisance des prix exprimés et des évaluations fournies dans les actes ou déclarations par rapport à la valeur vénale réelle du bien concerné.
Sauf exceptions, une insuffisance de prix ou de valeur déclarés est établie par le recours à la méthode d'évaluation par comparaison.
Dans un arrêt du 27 octobre 2009, la Cour de cassation rappelle que l’administration a cependant la possibilité d'écarter la méthode d'évaluation par comparaison lorsqu’il n’existe pas de marché de biens intrinsèquement similaires en faits et en droits.
Ainsi, elle juge que la prise en compte de restrictions à la disponibilité du bien par le biais de simples abattements appliqués à l’évaluation résultant des termes de comparaison produits n’est pas de nature à faire perdre leur caractère pertinent aux références invoquées.
« : Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X. a fait donation, en 1978, à ses enfants de la nue-propriété d’un bien immobilier situé au bord du lac Léman composée d’un château avec parc d’agrément et dépendances ; que cette donation était assortie d’une clause de réserve d’usufruit avec réversion de l’usufruit à son époux en cas de prédécès et d’une interdiction imposée aux nus-propriétaires d’aliéner et d’hypothéquer le bien pendant la vie de l’usufruitière et de son époux ; qu’à la suite d’un contrôle de la déclaration d’impôt de solidarité sur la fortune de M. et Mme X. (les époux X.), l’administration a remis en cause l’évaluation de 1 690 000 francs du bien et leur a notifié un redressement pour les années 1992 à 1995 calculé en retenant une valeur de 20 000 000 francs, ramenée à celle de 12 000 000 francs après observations des contribuables, afin de tenir compte de la nature spécifique de ce bien de famille ; qu’après la mise en recouvrement des droits rappelés sur cette base, les époux X. ont demandé le dégrèvement de l’imposition pour irrégularité de la procédure de notification ; que la cour d’appel après avoir fixé la valeur vénale du bien à la somme de 12 998 000 francs, valeur non contestée par les parties, a réduit les causes du redressement en appliquant, outre une décote, des abattements, le premier de 20% concernant le caractère indivis de la nue-propriété, le deuxième de 15% celui de la clause d’interdiction d’aliéner ou d’hypothéquer pendant la vie de l’usufruitière, le troisième de 20% en considération de l’occupation familiale du château ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident qui est préalable :
Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes concernant l'irrégularité de la procédure de redressement, alors, selon le moyen :
1° / que lorsque l'administration des impôts entend substituer à la valeur déclarée dans une déclaration d'impôt de solidarité sur la fortune la valeur vénale réelle du bien en cause, il lui appartient, dès la notification de redressement, de justifier l'évaluation par elle retenue au moyen d'éléments de comparaison tirés de la cession, à l'époque du fait générateur de l'impôt, de biens similaires, sauf dans les cas où, en raison de la singularité de ce bien, toute comparaison est impossible ; que, lorsque les biens en cause font l'objet d'une indivision, il appartient à l'administration fiscale, dès la notification de redressement, d'établir le bien-fondé de son évaluation par le recours à des éléments de comparaison tirés de la cession de droits indivis, dont la valeur propre diffère de la seule fraction de la valeur vénale totale du bien correspondant à la proportion des droits indivis ; qu'en énonçant, dès lors, pour retenir que la procédure de redressement suivie à l'encontre de M. et Mme Bruno X... Y..., relativement à la propriété située à Nernier dont la nue-propriété appartenait, de manière indivise, à leurs deux enfants, était régulière, que les éléments de comparaison, relatifs à des propriétés dont l'occupation n'était pas divisée entre plusieurs propriétaires devaient être considérés comme remplissant les conditions de similitude en droit et qu'il se déduisait des dispositions de l'article 885 G du code général des impôts que les démembrements de propriété pouvaient être pris en compte, s'il y a lieu, par le biais de simples moins values appliquées à l'évaluation résultant des références produites et n'étaient pas de nature à faire perdre leur caractère pertinent aux références invoquées, quand les éléments de comparaison invoqués par l'administration fiscale dans la notification de redressement du 18 octobre 1995 n'étaient pas tirés de la cession de droits indivis et quand elle ne caractérisait pas en quoi il aurait été, en l'espèce, impossible à l'administration fiscale de produire de tels éléments de comparaison en raison de la singularité du bien à évaluer résultant de l'état d'indivision dans lequel se trouvaient ses nus-propriétaires, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 17, L. 55 et L. 57 du livre des procédures fiscales ;
Mais attendu, selon l’article 17 du livre des procédures fiscales, qu’en ce qui concerne les droits d’enregistrement, l’administration des impôts peut rectifier le prix ou l’évaluation d’un bien ayant servi de base à la perception d’une imposition lorsque ce prix ou cette évaluation paraît inférieure à la valeur vénale réelle du bien ; que l’arrêt retient que les éléments de comparaison à savoir les ventes de 1989 à 1994 de six propriétés « bourgeoises » en bordure du lac entre Yvoire et Publier ont été mentionnées dans la notification de redressement avec les indications et caractéristiques requises ; qu’il relève que, pour tenir compte des observations des contribuables s’agissant de la nature juridique du bien, la valeur notifiée par le service à partir des éléments de comparaison similaires a fait l’objet d’un abattement de 40% ramenant la valeur vénale de 20 000 000 francs à 12 000 000 francs alors que les contribuables avaient déclaré ce bien pour une valeur de 1 690 000 francs ; qu’il relève encore que les ventes de château en bordure du lac Léman étant nécessairement limitées, les restrictions à la disponibilité du bien ou les démembrements de la propriété qui peuvent être prises en compte par le biais de simples moins values appliquées à l’évaluation résultant des références produites, ne sont pas de nature à faire perdre leur caractère pertinent aux références invoquées ; qu’ayant ainsi fait ressortir que la comparaison n’était pas possible parce qu’il n’existait pas un marché de biens intrinsèquement similaires en fait et en droit, la cour d’appel a, compte tenu des éléments de preuve présentés par l’administration et de l’abattement de 40% que celle-ci a admis, exactement déduit que la procédure de notification avait été régulière ; que le moyen n’est pas fondé ;
[…] ».
Publié au BOI 13 L-6-10
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