En application de l’article 885 A du code général des impôts (C.G.I.), les personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France sont soumises à l’impôt de solidarité sur la fortune (I.S.F.) à raison tant de leurs biens situés en France que hors de France.

A cet égard, l’article 4 B 1 du même code précise que sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l’article 4 A, les personnes qui ont en France leur foyer ou leur lieu de séjour principal ; celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu’elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques.

Plus précisément, le centre des intérêts économiques d’un contribuable se situe en France, lorsqu’il y effectue ses principaux investissements, ou y possède le siège de ses affaires, ou y administre ses biens ou encore lorsqu’il y a le centre de ses activités professionnelles ou enfin lorsqu’il y tire la majeure partie de ses revenus.

Par son arrêt du 3 mars 2009, la Cour de cassation précise que la territorialité de l’ISF est régie par les seules dispositions de l’article 4 B du CGI et qu’il s’ensuit que les placements financiers peuvent être pris en compte à ce titre. L’article 885 L du CGI qui exclut de l’ISF les placements financiers des personnes physiques n’ayant pas leur domicile fiscal en France est un texte d’assiette sans influence sur les règles de territorialité.

Néanmoins, si les critères de la domiciliation fiscale visés par l’article 4 B du code général des impôts sont les mêmes en matière d’impôt de solidarité sur la fortune et d’impôt sur le revenu, les périodes de référence pour apprécier ces critères diffèrent.

En matière d’impôt sur le revenu, qui vise la taxation d’un flux de revenus réalisé entre le 1er janvier et le 31 décembre d’une année, l’appréciation des critères prévus par l’article 4 B peut se faire tout au long de l’année.

En revanche, en matière d’ISF, qui taxe un patrimoine un état qui est dressé au 1er janvier de l’année, date du fait générateur de l’impôt, la territorialité est appréciée uniquement à cette date.

Par son arrêt du 21 juin 2011, la Cour de cassation confirme cette analyse à savoir que le domicile fiscal s’apprécie au 1er janvier de chaque année d’imposition, date du fait générateur de l’impôt et que le changement de domicile en cours d’année ne peut avoir une influence qu’au titre de l’ISF dû au 1er janvier de l’année suivante.


Instruction fiscale publiée au BOI 7 S 6-11

Cour de cassation, arrêt du 3 mars 2009

[…]

« Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 novembre 2007), que l’administration fiscale a notifié à X le 24 avril 2001, des redressements portant sur l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) au titre des années 1997 à 1999 ; que ce dernier est décédé, le 21 novembre 2001 ; que Mme Y, en sa qualité d’héritière, a assigné le directeur des services fiscaux chargé de la direction nationale des vérifications de situations fiscales en dégrèvement des impositions contestées, au motif que M. X ne disposait pas en France d’un domicile fiscal, dans la mesure où il n’y avait pas le centre de ses intérêts économiques au sens des dispositions de l’article 4 B du code général des impôts ;

Attendu que Mme Y fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen :

1°/ qu’elle faisait valoir que les investissements réalisés par X au cours des années en litige l’ont été exclusivement sur l’île de Grenade et que le patrimoine immobilier constitué en France est non productif de revenus de sorte que X doit être regardé comme ne possédant pas le centre de ses intérêts économiques en France ; qu’en omettant de répondre à ce moyen, pertinent en ce qu’il était de nature à influer sur la solution du litige en faveur de Mme Y, la cour d’appel a entaché sa décision de défaut de réponse à conclusion en violation des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que l’article 885 L du code général des impôts relatif à l’impôt de solidarité sur la fortune dispose que « les personnes physiques qui n’ont pas en France leur domicile fiscal ne sont pas imposables sur leurs placements financiers » a pour finalité d’inciter les redevables domiciliés hors de France à maintenir ou à accroître leurs placements financiers en France ; qu’il en résulte que les placements financiers effectués en France par un contribuable non-résident ne peuvent servir de fondement pour domicilier fiscalement celui-ci en France ; qu’en jugeant le contraire, la cour d’appel a violé les articles 4 B et 885 L du code général des impôts ; Mais attendu qu’après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, que X, qui vivait sur l’île de Grenade, y gérait un important patrimoine, constitué notamment de placements financiers situés en France, générateurs de revenus substantiels et dont le montant dépassait de loin la valeur totale de ses biens immobiliers, sis tant en France qu’à l’étranger, de sorte que le centre de ses intérêts économiques se situait en France au sens des dispositions de l’article 4 B, 1, du code général des impôts, l’arrêt retient que de tels placements ne pouvaient faire obstacle à l’imposition en France de M. X au titre de l’ISF, dans la mesure où ce dernier texte n’exclut pas les biens mentionnés par le premier alinéa de l’article 885 L du code général des impôts de la notion de domicile fiscal définie à l’article 4 A du même code ; qu’en l’état de ces constatations et énonciations, la cour d’appel, répondant aux conclusions prétendument délaissées, a statué à bon droit ; que le moyen n’est pas fondé ;

[…]. »

Cour de cassation, arrêt du 21 juin 2011

[…]
«Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 24 juin 2010), qu’à la suite d’une mutation professionnelle, M. C est allé habiter en Egypte du 1er juin 2005 au 31 août 2009 ; que, le 15 juin 2005, il a déposé une déclaration au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et a acquitté l’imposition correspondante ; que, le 20 janvier 2006, il a interrogé le centre des impôts, demandant, en application de l’article 81 A du code général des impôts le bénéfice de l’exonération de l’imposition sur les revenus pour les salaires perçus dans son entreprise en 2005 et a obtenu une réponse de l’administration le 1er février 2006 ; que, le 30 mai 2006, il a déposé sa déclaration relative à l’impôt sur le revenu et a déclaré ses salaires perçus avant le 1er juin 2005, ajoutant que les revenus des valeurs et capitaux mobiliers et les plus-values et gains taxables à 16% n’avaient pas été portés sur cette déclaration en application de la convention fiscale France-Egypte prévoyant que ce type de revenu est imposable dans l’Etat de domiciliation fiscale du contribuable ; que, le 11 janvier 2007, M. C a transmis au centre des impôts une déclaration rectificative au titre de l’ISF de 2005, demandant un remboursement en application de l’article 885 L du code général des impôts, que l’administration fiscale a rejeté par lettre du 9 mars 2007 ; que M. C a saisi le tribunal de grande instance d’un recours contre cette décision et formé une demande de dégrèvement au titre de l’ISF 2005 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. C fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté son recours contre la décision de rejet du 9 mars 2007, et sa demande de dégrèvement au titre de l’ISF de l’année 2005 ainsi que toutes ses demandes consécutives, alors, selon le moyen, que le domicile fiscal d’un contribuable doit être déterminé pour l’ensemble de l’année fiscale considérée ; que pour fixer les modalités d’imposition d’un contribuable à l’impôt de solidarité sur la fortune, le juge doit donc déterminer son domicile fiscal pour l’ensemble de l’année en cause, avant d’en déduire s’il avait son domicile fiscale en France au 1er janvier ; que dès lors, en appréciant le domicile fiscal de M. C au 1er janvier 2005 indépendamment du reste de l’année concernée, la Cour d’appel a violé l’article 4 B du code général des impôts, ensemble l’article 885 A du même code ;

Mais attendu que l’arrêt retient qu’aux termes de l’article 885 A du code général des impôts, le fait générateur de l’ISF se situe au 1er janvier de chaque année, date à laquelle il faut se placer pour apprécier les conditions d’assujettissement ; qu’il relève qu’à la date du 1er janvier 2005, le domicile fiscal des époux C était incontestablement fixé en France au regard de tous les critères visés par l’article 4 B §1 du code général des impôts et qu’inversement, à partir du 1er juin 2005, il ne remplissait plus aucun des critères de l’article 4 B précité ; qu’il retient qu’au regard de l’application de l’article 885 L du code général des impôts, le transfert de leur domicile fiscal à l’étranger au cours de l’année 2005 ne pouvait pas avoir d’incidence sur leur imposition sur la fortune au titre de l’année 2005, mais seulement au 1er janvier suivant et que rien ne permet à M. C de prétendre que l’effet de son transfert en Egypte au 1er juin 2005 l’a fait bénéficier d’un domicile fiscal à l’étranger dès le 1er janvier précédent ; que la cour d’appel a ainsi fait l’exacte application des textes visés au moyen ; que celui-ci n’est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que M. C fait le même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen, que selon la Convention fiscale France-Egypte, signée le 19 juin 1980 et approuvée par la loi n° 85.522 du 21 juin 1982 la résidence fiscale d’une personne assujettie à l’impôt dans l’un au moins de deux Etats doit être déterminée pour l’ensemble de l’année fiscale considérée ; que dès lors, en déterminant la résidence fiscale de M. C pour la période allant de janvier à juin 2005, indépendamment du reste de l’année concernée, la cour d’appel a violé l’article 4 de la Convention fiscale France-Egypte ;

Mais attendu que l’article 4-1 de la convention signée le 19 juin 1980 entre le gouvernement de la République française et celui de la République arabe d’Egypte en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune stipule que l’expression « résident d’un Etat » désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, est assujettie à l’impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue ; qu’ayant retenu que le fait générateur de l’ISF se situe au 1er janvier de chaque année, date à laquelle il faut se placer pour apprécier les conditions d’assujettissement, comme l’énonce l’article 885 A du code général des impôts, puis que rien ne permet à M. C de prétendre que l’effet de son transfert en Egypte au 1er juin 2005 l’a fait bénéficier d’un domicile fiscal à l’étranger dès le 1er janvier précédent et que les dispositions de la convention fiscale France-Egypte ne lui permettent pas de revendiquer le bénéfice d’un domicile fiscal à l’étranger au 1er janvier 2005 et que rien, dans ces dispositions conventionnelles, n’indique que la qualité de résident fiscal en Egypte acquise en cours d’année doit rétroagir au 1er janvier de l’année du transfert pour l’imposition sur la fortune, la cour d’appel a fait l’exacte application des stipulations conventionnelles visées au moyen ; que celui-ci n’est pas fondé ;
[…]

0 commentaires