L'article 885 I quater du code général des impôts (CGI) exonère, sous certaines conditions, d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), à concurrence des trois quarts de leur valeur, les parts ou actions de sociétés détenues par les salariés ou mandataires sociaux.

Des hésitations s'étant produites sur les modalités d'application de ce nouveau dispositif, la présente instruction administrative publiée au BOI 7 S-3-07 précise certains points, en complément de l'instruction publiée au bulletin officiel des impôts (BOI) 7 S-3-06 du 1er juin 2006.

1. Les articles cités dans la présente instruction administrative appartiennent, sauf indication contraire, au code général des impôts.

Section 1 : Situation du conjoint en cas de décès du dirigeant bénéficiant de l'exonération au titre des biens professionnels

2. Dans le cadre du dispositif de l'article 885 I quater, il a été admis (bulletin officiel des impôts (BOI) 7 S-3-06 § 52) que, dans l'hypothèse du décès du redevable qui remplissait la condition de fonction ou qui avait la qualité de retraité, pendant le délai de conservation de six ans, le conjoint survivant puisse continuer à bénéficier de l'exonération partielle, à condition qu'il conserve les titres jusqu'au terme du délai initialement prévu. En outre, il a été précisé qu'au-delà de cette période de six ans, l'époux survivant continuera à bénéficier de l'exonération, tant qu'il conservera les titres.

3. Afin de renforcer la stabilité du capital social des entreprises, il est admis que lorsque les titres sont conservés par l'époux survivant, cette mesure de faveur s'applique au conjoint survivant d'un redevable décédé qui bénéficiait du régime des biens professionnels prévu par l'article 885 O bis et qui remplissait, au 1er janvier de l'année du décès, toutes les conditions prévues par l'article 885 I quater pour pouvoir bénéficier de l'exonération partielle des trois quarts.

4. En conséquence, dans cette hypothèse, dès l'année suivant le décès du redevable dont les titres étaient exonérés en application des dispositions de l'article 885 O bis précité, l'époux survivant pourra bénéficier de l'exonération partielle prévue par l'article 885 I quater, sous réserve que soient satisfaites l'ensemble des conditions d'application de ce dispositif et notamment celle relative à la conservation des titres pour lesquels l'exonération partielle est demandée pendant six ans à compter de la première année d'application du régime de faveur.

Section 2 : Parts ou actions reçues en contrepartie d'un apport de titres qui bénéficiaient de l'exonération partielle prévue par l'article 885 I quater


5. Aux termes du deuxième alinéa de l'article 885 I quater, l'exonération partielle d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) est subordonnée à la condition que les parts ou actions restent la propriété du redevable pendant une durée minimale de six ans courant à compter du premier fait générateur au titre duquel l'exonération a été demandée.

Il en résulte que lorsque les parts ou actions pour lesquelles le redevable sollicite le bénéfice de l'exonération partielle prévue par l'article 885 I quater font l'objet d'une opération d'apport, ces parts ou actions ne peuvent plus bénéficier de ladite exonération, la condition de conservation faisant défaut.

6. Toutefois, il est admis que l'opération d'apport n'entraîne pas la déchéance de l'exonération partielle dont bénéficiaient ces parts ou actions, sous réserve que, jusqu'au terme du délai de conservation des titres d'origine :
- le redevable conserve les titres reçus en contrepartie de l'apport ;
- la société bénéficiaire de l'apport conserve les titres apportés ;
- la personne bénéficiaire de l'exonération partielle ou son conjoint, son concubin ou le partenaire avec lequel elle est liée par un pacte civil de solidarité (PACS) exerce dans la société bénéficiaire de l'apport son activité professionnelle principale, s'il s'agit d'une société de personnes, ou occupe une des fonctions limitativement énumérées par l'article 885 O bis, s'il s'agit d'une société de capitaux ;
- la personne bénéficiaire de l'exonération partielle ou son conjoint, son concubin, ou le partenaire avec lequel elle est liée par un PACS détient au minimum 95 % des titres de la société bénéficiaire de l'apport, en pleine propriété, ou, le cas échéant, en usufruit ;
- la valeur vénale de l'actif immobilisé de la société bénéficiaire de cette opération d'apport soit composée, à 95 % au minimum, par une participation dans la société dont les titres ont été apportés et que la valeur de cette participation représente au moins 90% de la valeur vénale de l'actif net de la société bénéficiaire de l'apport.

Dans cette situation, sous réserve du respect de ces conditions, l'exonération partielle est reportée sur les seuls titres reçus en contrepartie de l'apport.

7. De même, il est admis que l'avantage fiscal soit maintenu pour l'avenir, à la condition que l'ensemble des conditions précitées soit respecté pendant une nouvelle période de six ans.

8. Par ailleurs, sous réserve du respect de ces mêmes conditions, le bénéfice de l'exonération partielle d'ISF prévue en faveur des retraités n'est pas remis en cause lorsqu'une opération d'apport a été réalisée après la date à laquelle le redevable a fait valoir ses droits à la retraite. Dans cette situation, la période de six ans durant laquelle les quatre dernières conditions visées supra doivent être remplies s'apprécie à compter de la date de la première demande d'exonération.

Section 3 : Titres fongibles acquis à des dates différentes

9. Toute cession ou donation des titres de société pendant le délai de six ans entraîne la remise en cause de l'exonération partielle d'ISF depuis l'origine.

10. Dans l'hypothèse d'une cession partielle, pendant le délai précité, des titres de société bénéficiant du régime de faveur prévu à l'article 885 I quater, la remise en cause est limitée à la fraction des titres transmis. A cet égard, il a été précisé (cf. BOI 7 S-3-06 § 54) qu'en cas de cession portant sur des titres fongibles acquis ou souscrits à des dates différentes, les titres cédés sont ceux acquis ou souscrits aux dates les plus anciennes.

11. Il est précisé qu'en présence de titres fongibles dont une partie seulement a été soumise à l'engagement de conservation de six ans, il est considéré, à l'occasion de cessions de titres, pour l'exonération partielle prévue par l'article 885 I quater, que les titres cédés sont en priorité ceux qui n'ont pas été soumis à l'engagement. Dès lors, seuls les titres cédés au-delà de cette quote-part non soumise à engagement et qui ont bénéficié de l'exonération partielle sont concernés par la modalité de calcul visée au n°10.

12. Par ailleurs, il est rappelé qu'au-delà de la période de six ans précitée, toute transmission de titres au cours de l'année suivant le fait générateur de l'impôt n'emporte aucune incidence fiscale, y compris pour l'ISF de l'année de cession.

13. Exemple d'application :
En année N, M. X, salarié d'une société, a acheté 1 000 actions de la société où il travaille (il n'en possédait pas auparavant) et les a placées sous le régime de l'article 885 I quater en prenant l'engagement de conservation au 1er janvier de l'année N + 1.
En N + 3, il achète 500 actions de cette même société qu'il place sous engagement au 1er janvier N + 4.
En N + 4, M. X achète 300 titres qu'il ne place pas sous engagement. Il possède donc 1 800 actions de la société, dont 1500 ont été placées sous engagement.
En année N + 5, M. X vend 300 actions de la société. Aucune remise en cause de l'exonération partielle d'ISF appliquée entre N + 1 et N + 5 aux actions achetées en N et N + 3 ne sera effectuée. En effet, les actions cédées seront considérées comme étant celles qui n'ont pas été placées sous engagement.
En année N + 6, M. X acquiert 400 actions de la société qu'il place au 1er janvier N + 7 sous le bénéfice du régime d'exonération partielle en prenant l'engagement de conservation de six ans.
Il possède donc 1900 actions de la société placées sous engagement au 1er janvier N + 7.
Cette même année (N + 7), M. X vend 500 actions ; cette vente n'entraînera aucune remise en cause de l'exonération sur les actions soumises à engagement. En effet, s'agissant des titres soumis à engagement, les 500 titres cédés seront considérés comme étant ceux acquis à la date la plus ancienne, soit en N, et donc soumis à engagement de conservation depuis le 1er janvier N + 1. Ces titres ont été conservés pendant une durée de six ans, l'exonération pour les années N + 1 à N + 7 est donc définitivement acquise.
M. X maintient sous engagement 1400 actions.
En N + 9, M. X vend 1200 actions.
Au 1er janvier N + 10, l'exonération partielle est définitivement acquise sur 500 actions restantes des 1 000 actions acquises en N. Au contraire, les engagements de conservation pris au 1er janvier N + 4 sur les 500 actions acquises en N + 3 et pris au 1er janvier N + 7 sur les 400 actions acquises en N + 6 sont toujours en cours.
En conséquence, l'exonération partielle n'étant acquise que sur 500 des 1 200 actions cédées en N + 9, le régime de faveur est remis en cause au 1er janvier N + 10 sur les 400 actions acquises en N + 6 et sur 300 des 500 actions acquises en N + 3, soit 700 actions au total.

Section 4 : Parts de FCPE et de SICAVAS


14. L'appréciation de la quote-part de la valeur des parts de fonds commun de placement d'entreprise (FCPE) ou des actions de sociétés d'investissement à capital variable d'actionnariat salarié (SICAVAS) s'effectue au 1er janvier de l'année d'imposition. En conséquence, toute fluctuation, postérieurement au 1er janvier, du pourcentage de détention des titres de la société par l'organisme ne remet pas en cause l'exonération d'ISF dont le redevable a pu bénéficier au titre de l'année considérée. En revanche, au 1er janvier de l'année suivante, la fraction de valeur exonérée devra être ajustée en fonction de ces fluctuations (§ 49 du BOI 7 S-3-06).

15. Exemple : au 1er janvier N, M. X détenait 100 parts d'un FCPE dont la valeur était composée à 45 % de titres de la société A.
M. X exerce dans la société A sa profession principale en tant que directeur général. M. X ayant placé les parts du FCPE sous le régime de l'exonération partielle d'ISF de l'article 885 I quater, l'exonération d'ISF était donc au 1er janvier N de 75 % de 45 % de la valeur sa participation dans le FCPE, le reste de la valeur de chaque part de FCPE étant imposé.
Au 1er janvier N, chaque part du FCPE vaut 10 000 euros, dont 4 500 euros représentant les actions de la société A et 5 500 euros les autres actifs du FCPE.
La participation de M. X dans le FCPE, d'un montant de 1 000 000 euros, est donc exonérée à hauteur de 337 500 euros (1 000 000 45 % 75 %) et imposable pour le surplus, à hauteur de 662 500 euros.
Au 1er janvier N + 1, M. X détient toujours 100 parts du FCPE mais la valeur du FCPE n'est plus composée qu'à 25 % de titres de la société A.
M. X bénéficiera toujours de l'exonération et elle ne sera pas remise en cause pour l'année antérieure, mais le montant de l'exonération sera ajusté à 75 % de 25 % de la valeur des parts du FCPE pour l'ISF de N + 1.
Au 1er janvier N + 1, une part du FCPE vaut 15 000 euros, dont 3 750 euros représentant les actions de la société A et 11 250 euros les autres actifs.
La participation de M. X dans le FCPE, d'un montant de 1 500 000 euros, est donc exonérée a hauteur de 281 250 euros (1 500 000 25 % 75 %) et imposable pour le surplus, à hauteur de 1 218 750 euros.
Bien entendu, M. X devra conserver les 100 parts du FCPE pendant 6 ans à compter du 1er janvier N pour que l'exonération partielle ne soit pas remise en cause.

Section 5 : Entrée en vigueur

16. Ces précisions sont applicables à l'ISF dû à compter du 1er janvier 2006.
BOI lié : 7 S-3-06.

L'instruction officielle est publiée au BOI 7 S-3-07

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