En application des dispositions de l’article L.180 du livre des procédures fiscales, en matière de droits d’enregistrement, de taxe de publicité foncière, de taxes, redevances et autres impositions assimilées, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à l’expiration de la troisième année suivant celle de l’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration ou de l’accomplissement de la formalité fusionnée définie à l’article 647 du code général des impôts.

Toutefois, ce délai n’est opposable à l’administration que si l’exigibilité des droits et taxes a été suffisamment révélée par le document enregistré ou présenté à la formalité, sans qu’il soit nécessaire de procéder à des recherches ultérieures.

Par cet arrêt, la Cour de cassation rappelle qu’une déclaration de résultat, qui n’est pas un acte enregistré, ne saurait en aucun cas constituer un acte révélateur de l’exigibilité des droits.


Dès lors, le délai de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à l’expiration du délai prévu par l’article L. 186 du livre des procédures fiscales.

Le délai de prescription de six ans prévu par l’article L. 186 du livre des procédures fiscales(1) constitue le délai de prescription de droit commun applicable à l’ensemble des impôts.

La prescription triennale, dite « prescription abrégée » prévue à l’article L. 180 du même livre constitue, quant à elle, l’exception au principe de la prescription sexennale.

A cet égard, l’article L. 180 du livre des procédures fiscales dispose : « Pour les droits d’enregistrement, la taxe de publicité foncière, les droits de timbre, ainsi que les taxes, redevances et autres impositions assimilées, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à l’expiration de la troisième année suivant celle de l’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration ou de l’accomplissement de la formalité fusionnée définie à l’article 647 du code général des impôts. Toutefois, ce délai n’est opposable à l’administration que si l’exigibilité des droits et taxes a été suffisamment révélée par le document enregistré ou présenté à la formalité, sans qu’il soit nécessaire de procéder à des recherches ultérieures ».

L’application de cet article – et donc de la prescription triennale – suppose que soient remplies les deux conditions suivantes :
- d’une part, que l’administration ait eu connaissance de l’exigibilité des droits par l’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration ou encore par l’accomplissement de la formalité fusionnée ;
- d’autre part, que l’exigibilité des droits dus soit suffisamment révélée par l’acte enregistré ou présenté à la formalité, sans qu’il soit nécessaire pour le service de procéder à des recherches ultérieures.

Lorsque l’une ou l’autre de ces conditions fait défaut, c’est la prescription longue prévue par l’article L. 186 du livre des procédures fiscales précité qui est mise en oeuvre.

S’agissant de la première condition, la Cour de cassation interprète strictement l’article L. 180 du livre des procédures fiscales : seul l’acte ou la déclaration soumis à l’enregistrement ou l’exécution de la formalité fusionnée peut faire courir la prescription abrégée, même si l’administration avait eu connaissance de l’exigibilité des droits omis par d’autres moyens.

Ainsi, la simple remise d’une déclaration de revenus ou de bénéfices, la déclaration de l’option de la taxe sur la valeur ajoutée, les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée souscrites ou le rôle de taxe foncière ne peuvent être assimilés à l’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration au sens de l’article L. 180 du livre des procédures fiscales (Cass. com. 15 décembre 1982, Société Cabinet Claude Choisnet, arrêt n°1068, pourvoi n°81-15603, Bull. civ. IV, n° 415 ; Cass. com. 12 février 2008, Sté La Vergnolles, arrêt n 229 F-D, pourvoi n°06-21565; Cass. com. 23 juin 2009, Sté Cie Foncière Alpha, arrêt n° 601 F-D, pourvoi n°08-12813).

De même, la signification au conservateur des hypothèques d’une décision judiciaire, exclue du champ de la formalité fusionnée, et révélant l’existence d’un don manuel, ne peut être assimilée à un enregistrement (Cass. com. 19 décembre 2000, Guesnery, arrêt n° 2236 FS-P, pourvoi n° 98-12850, Bull. civ. IV n°204).

Il en va de même pour l’information donnée à l’administration fiscale à l’occasion, notamment, d’une procédure contentieuse selon laquelle une société possédait un immeuble en France ou la publication au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales de la radiation du contribuable du registre du commerce et des sociétés ne peuvent entraîner l’application de la prescription abrégée en l’absence d’acte ou de document présenté à l’enregistrement ou de l’accomplissement de la formalité fusionnée (Cass. com. 20 novembre 2001, Sté Continental, arrêt n° 1918 FS-D, pourvoi n° 98-22708; Cass. com. 2 mai 2007, Bazzali, arrêt n° 666 F-D, pourvoi n° 06-13291).

Enfin, la Haute Juridiction a jugé, dans un arrêt de principe rendu le 31 octobre 2006, que l’exigibilité des droits ne saurait être révélée par une notification de redressements que l'administration adresse au redevable, qui constitue le document par lequel l’administration tire les conséquences de son contrôle, alors que par ailleurs il n'est invoqué aucun acte répondant aux conditions fixées par les articles L. 180 et L. 181 du livre des procédures fiscales (Cass. com. 31 octobre 2006, Angly Megret, arrêt n° 1184
FS-P+B+R+I, pourvoi n° 04-10766, Bull. civ. IV. n° 208; également, Cass. com. 20 mai 2008, SCI Les Thilias, arrêt n° 591 F-D, pourvoi n° 07-11952 ; Cass. com. 27 octobre 2009, SCI La Lagune, arrêt n° 944 F-P+B, pourvoi n° 08-19979, Bull. civ. IV, n° 135).

Faisant application de ces dispositions, la Cour de cassation rappelle qu’une déclaration de résultat, n’étant pas un acte enregistré, ne peut constituer l’acte révélant l’exigibilité des droits au sens de l’article L. 180 du L.P.F..

Cour de cassation, arrêt du 1er mars 2011
« […]

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 180 et L. 186 du livre des procédures fiscales, dans leur rédaction alors applicable ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, économique et financière, 6 mai 2008, pourvoi n° 07-13.521) que la société T (la société) a, le 6 novembre 1990, acquis en qualité de marchand de biens un ensemble immobilier en plaçant cette acquisition sous le régime de faveur de l’article 1115 du code général des impôts ; que, le 3 novembre 2003, l’administration fiscale a remis en cause ce régime et lui a notifié un redressement en raison du défaut de revente de ce bien dans le délai légal imparti ; que les droits ont été mis en recouvrement par avis du 29 avril 2004 ; qu’après rejet de sa demande, la société a assigné le directeur des services fiscaux des Alpes-Maritimes devant le tribunal aux fins d’obtenir le dégrèvement de ces droits.

Attendu que pour infirmer le jugement, et dire la procédure de redressement irrégulière, l’arrêt retient que les informations données chaque année par la société T sur l’état de ses ventes et de son stock au travers de la déclaration de son résultat avaient suffisamment révélé à l’administration fiscale l’exigibilité des droits et taxes relatifs aux biens immobiliers, ces déclarations révélant qu’aucune vente d’élément du stock n’avait eu lieu entre l’acquisition et le 31 décembre 1998 ; qu’il en déduit que la prescription abrégée doit s’appliquer ;

Attendu qu’en statuant ainsi, alors que la déclaration de résultat, n’étant pas un acte enregistré, ne pouvait constituer l’acte révélant l’exigibilité des droits au sens de l’article L. 180 du Livre des procédures fiscales, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

[…] ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE […] »

Instruction administraive publiée au BOI 13 L-7-11

(1) Il est précisé que l’article 12-I de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat a substitué à l’ancienne prescription décennale un délai de prescription qui s’exerce jusqu’à l’expiration de la sixième année suivant celle du fait générateur de l’impôt.

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