L'instruction fiscale publiée au BOI 4 K-1-11 a pour objet de permettre aux sociétés d’investissement à capital variable (SICAV) de « couponner » les revenus qu’elles distribuent à leurs actionnaires non résidents de France, c’est-à-dire de ventiler ces revenus en tenant compte de l’Etat de leur source (France ou étranger) et de leur nature juridique (revenus d’obligations, dividendes…).
Rappel du traitement fiscal des distributions de revenus effectuées par les SICAV à leurs actionnaires non-résidents

Les SICAV sont des sociétés anonymes qui, en vertu du 1° bis A de l’article 208 du code général des impôts (CGI), sont exonérées d’impôt sur les sociétés (IS) à raison des bénéfices réalisés dans le cadre de leur objet légal.

Malgré leur personnalité morale, elles ont la possibilité de « couponner » les revenus versés à leurs actionnaires résidents de France, c’est-à-dire de ventiler ces revenus en tenant compte de leur source (française ou étrangère) et de leur nature (dividendes, revenus d’obligations…).



En revanche, les distributions de revenus effectuées par les SICAV à leurs actionnaires non résidents sont imposables selon le régime des produits d’actions, sauf dans le cas des SICAV dont le portefeuille est exclusivement composé d’obligations françaises.

Principe d’imposition selon le régime des produits d’actions


Les revenus distribués par les SICAV établies en France à leurs actionnaires non résidents donnent lieu, quelles que soient l’origine et la nature des revenus, à l’application de la retenue à la source prévue au 2 de l’article 119 bis du CGI.

De plus, la retenue à la source sur les revenus distribués par les sociétés établies en France, y compris les SICAV, s’applique obligatoirement depuis le 1er mars 2010 au taux de 50 % lorsque ces revenus sont payés hors de France dans un Etat ou un territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A du CGI, quel que soit le domicile fiscal ou le siège social du bénéficiaire de ces revenus (2 de l’article 119 bis et 2 de l’article 187 du CGI) (1).Cependant, la retenue à la source ainsi pratiquée lors de la distribution des revenus par les SICAV établies en France à leurs actionnaires non résidents peut être, le cas échéant, limitée ou supprimée en application des dispositions de la convention fiscale internationale conclue entre la France et l’Etat de résidence du bénéficiaire.

En outre, les SICAV peuvent transférer à leurs actionnaires les crédits d’impôt attachés aux revenus distribués qu’elles ont encaissés en amont ; les retenues à la source précitées peuvent ainsi être réduites par l’imputation de ces crédits d’impôt.

S’agissant des revenus des valeurs mobilières de source française du portefeuille, un crédit d’impôt s’applique ainsi à hauteur de la retenue à la source appliquée, lors de leur encaissement par la SICAV, aux produits des obligations et titres assimilés émis avant le 1er janvier 1987. Le taux de cette retenue à la source est de 10 % ou de 12 % selon la date d’émission de l’obligation et la nature des produits (intérêts ou lots et primes de remboursement).

S’agissant des revenus des valeurs mobilières de source étrangère encaissés par la SICAV, le crédit d’impôt est limité lors de la distribution à l’actionnaire non résident à celui prévu par les dispositions de la convention fiscale liant l’Etat de source des revenus et la France.

Ces crédits d’impôt, ajoutés au dividende pour le calcul de la retenue à la source, ne sont pas restituables.

Exception : cas des SICAV dont le portefeuille est composé exclusivement d’obligations françaises


Par exception à la règle d’imposition selon le régime des produits d’actions, le coupon représentatif d'obligations françaises non indexées mis en paiement par les SICAV dont le portefeuille est exclusivement composé d'obligations françaises est considéré comme un  produit d'obligation pour les actionnaires dont le domicile fiscal ou le siège n'est pas situé en France (2).

Le rescrit 2009/27 (FE) publié le 14 avril 2009 a étendu cette mesure de tolérance aux coupons représentatifs d'obligations françaises dont l'indexation est autorisée par les articles L. 112-1 à L. 112-4 du code monétaire et financier.

Il s'ensuit qu’en règle générale ces coupons, représentatifs d'obligations françaises, ne sont pas soumis à une imposition en France, sauf en cas d’application de la retenue à la source au taux majoré de 50 % (produits payés hors de France dans un Etat ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A du CGI), cette dernière pouvant, le cas échéant, être limitée ou supprimée en application des dispositions de la convention fiscale internationale conclue entre la France et l’Etat de résidence du bénéficiaire.

Admission du "couponnage" pour les revenus distribués par les SICAV à leurs actionnaires non-résidents


Il est désormais admis que les SICAV peuvent « couponner » les revenus qu’elles distribuent à leurs actionnaires non résidents de France, c’est-à-dire ventiler ces revenus en tenant compte de l’Etat de leur source (France ou étranger) et de leur nature juridique (revenus d’obligations, dividendes, …).

Les revenus encaissés et redistribués par les SICAV conservent à la fois leur source française ou étrangère et leur qualification propre de produits de placements à revenu fixe (intérêts et assimilés) ou à revenu variable (dividendes et assimilés), comme s’ils étaient directement versés par l’entreprise distributrice aux porteurs de parts non résidents.

Dès lors, aucun prélèvement ou retenue ne peut être opéré au titre de l’impôt français sur la fraction des sommes réparties correspondant aux revenus de valeurs mobilières de source étrangère distribués par la SICAV à ses actionnaires non résidents, ces revenus transitant en franchise d’impôt par la SICAV.

Il sera loisible aux actionnaires non résidents de se prévaloir de la  convention liant le pays dont ils sont résidents avec celui de la source des revenus pour obtenir, le cas échéant, la suppression ou la limitation de l’impôt étranger dans ce dernier pays, la SICAV n’étant pas tenue, en pareil cas, d’intervenir dans les procédures conventionnelles de remboursement.

Concernant la fraction des sommes réparties correspondant aux revenus de valeurs mobilières de source française distribués par la SICAV à ses actionnaires non résidents, il convient de distinguer le traitement fiscal des produits de placement à revenu fixe (intérêts et assimilés) de celui des produits de placement à revenu variable (dividendes et assimilés).

Les produits de placements à revenu fixe de source française distribués par la SICAV à ses actionnaires non résidents de France ne sont en règle générale pas soumis à une imposition en France, sauf en cas d’application de la retenue à la source au taux majoré de 50 % (produits payés hors de France dans un Etat ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A du CGI), cette dernière pouvant, le cas échéant, être limitée ou supprimée en application des dispositions de la convention fiscale internationale conclue entre la France et l’Etat de résidence du bénéficiaire.

Les produits de placement à revenu variable de source française versés par la SICAV à ses actionnaires non résidents supportent une retenue à la source dont le taux mentionné au 1 de l’article 187 du CGI est de :
- 15 % pour les dividendes perçus par les organismes sans but lucratif non résidents qui ont leur siège dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l’Espace économique européen (EEE) ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales et qui seraient imposés dans les conditions prévues au 5 de l’article 206 du CGI s’ils avaient leur siège en France ;
- 19 % pour les revenus de la nature de ceux éligibles à l'abattement de 40 % prévu au 2° du 3 de l'article 158 du même code (3) lorsqu'ils bénéficient à des personnes physiques qui ont leur domicile fiscal hors de France dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'EEE ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale;
- 25 % pour tous les autres revenus, dont les dividendes perçus par les actionnaires personnes morales non résidentes.

Indépendamment du domicile fiscal ou du siège social du bénéficiaire des revenus, la retenue à la source s’applique au taux majoré de 50 % si les produits concernés sont payés hors de France dans un Etat ou un territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A du CGI.

Cependant, les actionnaires de la SICAV qui sont résidents d’un pays lié à la France par une convention fiscale internationale peuvent se prévaloir des clauses de cette convention en vue d’obtenir la limitation ou la suppression des retenues à la source précitées, y compris celle applicable au taux majoré de 50 %.

Entrée en vigueur

Les dispositions de l'instruction fiscale 4 K1-11 sont applicables aux distributions de revenus effectuées par les SICAV à leurs actionnaires non résidents à compter de sa publication.


(1) Cf. rescrit n° 2010/11 (FP et FE) du 22 février 2010 pour les produits de placement à revenu fixe et rescrit n° 2010/30 (FE) du 4 mai 2010 pour les produits de placement à revenu variable.
(2) Documentation de base (DB) B 4 K 162 n° 16.
(3) Si la SICAV ne procède à aucune ventilation des distributions ou répartitions, les revenus distribués ne sont pas éligibles à cet abattement.

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